L’accord du participe passé est un des premiers pièges d’orthographe grammaticale en français. Parfois, le participe passé s’accorde avec le sujet, parfois avec le complément, parfois il reste invariable… ça semble un vrai casse-tête pour savoir quand et avec quoi l’accorder !
Je vous propose aujourd’hui de reprendre les 3 règles principales de l’accord du participe passé. Grâce à ces bases, sans trop vous farcir le cerveau, vous éviterez déjà la grande majorité des fautes, et vous n’aurez plus qu’à vérifier quelques cas particuliers.
1 — Temps composés avec l’auxiliaire être : on accorde le participe passé avec le sujet
Dans tous les temps formés avec l’auxiliaire être, le participe passé se comporte comme un adjectif attribut. On l’accorde donc avec le sujet en genre (féminin/masculin) et en nombre (singulier/pluriel).
On peut en effet visualiser le verbe être (même s’il est auxiliaire) comme un signe d’égalité : on voit bien dans les exemples ci-dessous que ce qui suit le verbe être correspond au sujet. Il est donc logique d’accorder les deux.
Comparaison participe passé/adjectif attribut du sujet
Auxiliaire être + participe passé | Verbe être + adjectif attribut |
Marie est partie hier (Marie = partie). | Marie est joyeuse (Marie = joyeuse). |
À l’heure qu’il est, je pense que Vincent sera arrivé (Vincent = arrivé). | Vincent sera sans doute fatigué (Vincent = fatigué). |
Mes cousins étaient bloqués dehors dans la neige (mes cousins = bloqués). | Mes cousins étaient furieux (mes cousins = furieux). |
Les fillettes avaient été mordues par un chien (les fillettes = mordues). | Les fillettes étaient terrifiées (les fillettes = terrifiées) |
À noter : cette règle est valable pour les différents temps composés ainsi que pour la voix passive ; on peut ainsi trouver l’auxiliaire avoir en plus de l’auxiliaire être (cf. les fillettes avaient été mordues), sans que cela change la donne.
NB : L’accord du participe passé avec les verbes pronominaux (se lever, se rendre, s’appeler, se souvenir, etc.) fonctionne selon une logique très particulière et suffisamment complexe pour nécessiter un traitement spécifique. Cela sera donc le sujet d’un article ultérieur.
2 — Temps composés avec l’auxiliaire avoir : le participe passé est invariable (enfin, la plupart du temps…)
Avec l’auxiliaire avoir, le participe passé n’a plus aucun lien d’identité avec le sujet. Il devient l’équivalent d’un complément d’objet. C’est pourquoi, lorsque la phrase suit l’ordre logique de base (sujet-verbe-complément), il reste invariable.
Marie a pris le train hier. Elle avait téléphoné à ses parents pour les prévenir.
Vincent a conduit la voiture de sa mère, il a roulé toute la nuit.
Mes cousins avaient appelé plusieurs serruriers, mais aucun n’avait répondu à leur demande.
3 — Temps composés avec l’auxiliaire avoir : l’accord avec le COD antéposé
Alors oui, il existe quand même une subtilité, sinon ce ne serait pas drôle. Je vous disais au-dessus qu’avec l’auxiliaire avoir, le participe prend le rôle de complément. Eh bien du coup, il s’accorde avec ce complément… mais attention, seulement si les deux conditions suivantes sont remplies :
- Ce complément est placé avant le groupe verbal dans la phrase.
- C’est un complément d’objet direct.
Cela limite fortement le nombre de cas, mais cela arrive tout de même assez souvent pour que vous reteniez la règle !
COD/COI/CC : c’est quoi déjà ?
Le COD (complément d’objet direct) suit directement le verbe, comme son nom l’indique — on peut l’identifier en posant la question « Quoi ? ».
Le COI (complément d’objet indirect) est séparé du verbe par une préposition (à, de, pour, etc.)
Les CC (compléments circonstanciels) sont indépendants du groupe verbal et donnent des indications de temps, lieu, moyen, etc. Ils répondent aux questions « Quand ? Où ? Comment ? … »
Si nous reprenons les exemples de la section précédente, seules trois propositions comportent un COD et pourraient donc voir le participe s’accorder avec lui en modifiant l’ordre des groupes :
Marie a pris le train > le train que Marie a pris… (le train est bien COD, mais cela dit, comme le train est masculin singulier, ça ne change rien 😉).
Vincent a conduit la voiture de sa mère > C’est cette voiture que Vincent a conduite (la voiture est bien COD et elle est placée avant le verbe, on accorde donc le participe passé).
Mes cousins avaient appelé plusieurs serruriers > De tous les serruriers que mes cousins avaient appelés, aucun n’avait répondu (les serruriers sont bien COD, donc lorsqu’on les mentionne avant, on accorde le participe passé).
En revanche, les autres participes passés resteront invariables.
Elle a téléphoné à ses parents > à ses parents est un COI > ses parents, à qui elle avait téléphoné…
Il a roulé toute la nuit > attention au piège : toute la nuit est en réalité un complément circonstanciel de temps ; il répond à la question « quand ? » et non « quoi ? » > Toute la nuit où il a roulé.
Aucun n’avait répondu à leur demande > à leur demande est un COI > À leur demande personne n’avait répondu. (En plus, la formulation est ambiguë et maladroite.)
Vous avez tout suivi ? Voici un exercice pour vérifier.
Dans le texte suivant (de ma composition et spécialement adapté pour l’occasion), complétez les terminaisons des 20 participes, en les accordant si nécessaire. Les solutions sont en dessous.
Édouard et la galette
Aujourd’hui, comme d’habitude, ce bon à rien d’Édouard a (usé —) de son sourire aguicheur pour s’incruster à la ferme des voisins : il a (entendu —) dire que l’on y tire les rois en famille avec trois générations. Avec toute cette foule, il devrait pouvoir en profiter pour se régaler sans être (repéré —).
Pour l’occasion, on a (décoré —) la grange : on a (récupéré —) les guirlandes du sapin qui festonnent à présent les hauts murs en pierre. Une longue table a été (improvisé —) grâce à des planches qu’on a (posé —) sur des tréteaux et (couvert —) d’une nappe en papier. Une bonne dizaine de galettes s’étale sous les yeux émerveillés d’Édouard. Il y en a pour tous les goûts, à la frangipane, au chocolat, à la noisette, disent les convives qui les ont (apporté —). La pâte feuilletée dorée à la promesse croustillante rivalise avec le moelleux des brioches qui sont (garni —) de fruits confits. Édouard reluque les pâtisseries à distance. La salive a déjà (envahi —) sa bouche. Il ne sait quelle galette il a envie de goûter, ou plutôt, il voudrait toutes les engloutir.
Les gamins se disputent pour décider qui ira sous la table. Après quelques âpres négociations, un accord général a été (trouvé —). Une fillette se glisse entre les tréteaux tandis que les autres se rangent sagement en rang pour attendre leur tour.
La matrone commence à découper et la fillette à énoncer les noms des heureux élus : « Maman… Tata Léonie… Tati Mireille… »
Édouard a vite (pris —) conscience qu’aucun gamin ne le mentionnera s’il ne prend pas les choses en main. Il s’approche des gosses qui font la queue et s’adresse discrètement au petit le plus proche, un blondinet aux joues rebondies :
« Si tu dis “Édouard” quand tu seras sous la table, je te donnerai cette pièce, d’accord ? »
Il a (sorti —) de sa poche une pièce de cinq centimes. Le marmot regarde le reflet cuivré avec des yeux brillants.
Quelques minutes plus tard, Édouard s’approche de la table, triomphant, pour récupérer sa part de galette. Sa joie se mue en déception lorsqu’il avise son assiette : il est (tombé —) sur la galette la plus rabougrie du lot ! La pâte trop cuite s’effrite en miettes brunâtres, la garniture a (séché —). Lorsque le bambin ressort de sous la table et vient réclamer son dû, Édouard le rabroue en lui montrant sa pitance.
Catastrophe, le petit a (fondu —) en larmes ! Sa mère a bien sûr (accouru —) dans l’instant. À présent, elle tend à son fils une part de la plus belle galette, à la garniture généreuse et encore tiède, pour le consoler.
À peine a-t-elle (tourné —) les talons que le vil Édouard propose un échange au gamin. Allez, dans un élan de générosité, il lui donne même la piécette qu’il lui avait (promis —) tout à l’heure !
Édouard et la galette (solution)
Aujourd’hui, comme d’habitude, ce bon à rien d’Édouard a usé de son sourire aguicheur pour s’incruster à la ferme des voisins : il a entendu dire que l’on y tire les rois en famille avec trois générations. Avec toute cette foule, il devrait pouvoir en profiter pour se régaler sans être repéré.
Pour l’occasion, on a décoré la grange : on a récupéré les guirlandes du sapin qui festonnent à présent les hauts murs en pierre. Une longue table a été improvisée grâce à des planches qu’on a posées sur des tréteaux et couvertes d’une nappe en papier. Une bonne dizaine de galettes s’étale sous les yeux émerveillés d’Édouard. Il y en a pour tous les goûts, à la frangipane, au chocolat, à la noisette, disent les convives qui les ont apportées. La pâte feuilletée dorée à la promesse croustillante rivalise avec le moelleux des brioches qui sont garnies de fruits confits. Édouard reluque les pâtisseries à distance. La salive a déjà envahi sa bouche. Il ne sait quelle galette il a envie de goûter, ou plutôt, il voudrait toutes les engloutir.
Les gamins se disputent pour décider qui ira sous la table. Après quelques âpres négociations, un accord général est trouvé. Une fillette se glisse entre les tréteaux tandis que les autres se rangent sagement en rang pour attendre leur tour.
La matrone commence à découper et la fillette à énoncer les noms des heureux élus : « Maman… Tata Léonie… Tati Mireille… »
Édouard a vite pris conscience qu’aucun gamin ne le mentionnera s’il ne prend pas les choses en main. Il s’approche des gosses qui font la queue et s’adresse discrètement au petit le plus proche, un blondinet aux joues rebondies :
« Si tu dis “Édouard” quand tu seras sous la table, je te donnerai cette pièce, d’accord ? »
Il a sorti de sa poche une pièce de cinq centimes. Le marmot regarde le reflet cuivré avec des yeux brillants.
Quelques minutes plus tard, Édouard s’approche de la table, triomphant, pour récupérer sa part de galette. Sa joie se mue en déception lorsqu’il avise son assiette : il est tombé sur la galette la plus rabougrie du lot ! La pâte trop cuite s’effrite en miettes brunâtres, la garniture a séché. Lorsque le bambin ressort de sous la table et vient réclamer son dû, Édouard le rabroue en lui montrant sa pitance.
Catastrophe, le petit a fondu en larmes ! Sa mère a bien sûr accouru dans l’instant. À présent, elle tend à son fils une part de la plus belle galette, à la garniture généreuse et encore tiède, pour le consoler.
À peine a-t-elle tourné les talons que le vil Édouard propose un échange au gamin. Allez, dans un élan de générosité, il lui donne même la piécette qu’il lui avait promise tout à l’heure !
J’espère que cet article vous a été utile, que vous avez tout juste sur l’exercice… et que vous avez savouré mon histoire de galette 😊.
Il vous reste des questions, des remarques ? Dites-moi tout en commentaire ici, ou contactez-moi directement par-là ! Et comme toujours, vous pouvez faire appel à mes services d’écrivain public : plus d’informations sur cette page.
En tout cas, j’suis très content. J’ai beaucoup appris sur l’accord de participe passé ; avant j ne connaissais pas ça ; mais grâce à ce site internet qui est » champd’écriture » j suis maintenant capable de faire n’importe quel accord du participe passé.
Je suis ravie si l’article a pu vous être utile 🙂
Bonjour,
Merci pour vos explications…
Cependant…
Comment accorder dans le cas qui suit ?
1/ Vous vous apprêtez à lire l’histoire d’amour que ma meilleure amie Solange, a vécU avec Alain.
2/ Vous vous apprêtez à lire l’histoire d’amour que ma meilleure amie Solange, a vécUE avec Alain.
J’opterais pour la première option.
Merci pour votre réponse à venir.
Celestina
Bonjour Celestina,
Dans le cas que vous proposez, le COD de « vivre » est « l’histoire d’amour » et ce COD est placé avant le verbe. Donc, il faut choisir la deuxième option avec le participe accordé :
Vous vous apprêtez à lire l’histoire d’amour que ma meilleure amie Solange a vécue avec Alain.
L’accord du participe passé dans les phrases complexes est un vrai casse-tête, j’espère vous avoir aidée ! 🙂