Vous préparez NaNoWriMo ou l’écriture de votre prochain roman. Peut-être avez-vous déjà commencé, et vous trouvez-vous perdu(e) au milieu ? Ou encore, vous en êtes à la phase de relecture, mais vous n’êtes pas sûr(e) que votre récit tient la route.
Il est sans doute temps de vous atteler à un peu de théorie sur la structure narrative et aller voir des « méthodes d’écriture ».
Est-ce que j’ai vraiment besoin de savoir ça ?
Cela peut vous sembler rébarbatif. Pourtant, ce sont des connaissances essentielles. C’est l’équivalent des études anatomiques en dessin. Savoir dessiner un corps parfaitement réaliste et proportionné permet ensuite de jouer avec les formes.
De même, l’étude des mécanismes narratifs vous donnera la clé pour améliorer vos intrigues en faisant des choix éclairés et volontaires.
Quelle méthode choisir ?
Il existe des centaines de méthodes et de diagrammes sur l’organisation d’un récit. Il y a de quoi s’y perdre ! Mais pas de panique. En fait, on retrouve toujours les mêmes grandes lignes, parce que les histoires suivent une trame plus ou moins universelle depuis la nuit des temps : exposition, développement, point culminant, résolution…
La différence tient surtout dans la manière de présenter les choses et le degré de précision des descriptions. Il vous faudra sans doute fouiller un peu pour trouver l’explication qui vous paraît la plus claire. Si un modèle vous semble confus ou aride, allez chercher ailleurs, voilà tout.
Une méthode, ça n’est pas réducteur ?
Les méthodes les plus intéressantes à mes yeux ne sont pas à proprement parler des méthodes, mais plutôt le résultat d’études de cas : des spécialistes très patients ont décortiqué les mécanismes de quantité d’histoires « qui marchent ». Ils ont mis au jour les points culminants, les charnières, les étapes. Et donc des structures types de récit.
En appliquant leur démarche à l’envers, on peut suivre un plan type et écrire une histoire cohérente. Ça ne fait pas tout bien sûr, mais c’est déjà énorme. Et comme je le disais au début, ce sont des exercices qui vous feront progresser. L’idée est bien sûr de ne pas rester figé sur des structures « toutes faites », mais de vous les approprier pour ensuite les utiliser selon vos besoins, quitte à les détourner.
Venons-en à du concret.
Le plan minimaliste
Pour Stephen King, de bons personnages suffisent à lancer une intrigue. Par « bon » personnage, on entend un personnage qui a un désir intense ou un manque cruel au départ, ou plusieurs personnages aux buts opposés. Cette situation engendre une frustration qui pousse les personnages à passer à l’action.
De son côté, Jerry Cleaver propose dans son cours d’écriture Immediate Fiction une équation d’une simplicité géniale :
CONFLIT + ACTION + RÉSOLUTION = HISTOIRE
Cette formule facile à mémoriser constitue un garde-fou, une boussole dans le brouillard, un élément de vérification fabuleux. Pour certains, ça suffit. En ce qui me concerne, j’ai adoré les conseils de Cleaver, et je conseille vivement son livre, mais pour écrire un roman, j’avais besoin de points de repère un peu plus détaillés.
Le monomythe & le cercle narratif
C’est Joseph Campbell qui a élaboré le modèle du monomythe dans son ouvrage Le Héros aux Mille Visages, en s’appuyant sur l’étude de mythes de diverses civilisations. Son modèle en forme de cercle a ensuite été repris et simplifié par le scénariste Dan Harmon.
Le cercle est un symbole fort qui nous permet d’organiser tout récit de façon satisfaisante. Ce n’est sans doute pas pour rien que l’on parle de « boucler » quelque chose.
Le modèle d’intrigue circulaire développée par Campbell est parfaitement adapté à tout ce qui est aventure, conte, heroic fantasy. C’est logique, puisqu’il est basé sur la structure des mythes fondateurs. C’est par exemple la trame de la première trilogie Star Wars. Mais ce modèle s’adapte aussi très bien à d’autres genres, pourvu que l’on suive les étapes de façon symbolique et non littérale.
Pour ma part, j’ai adopté la version simplifiée du cercle narratif mise au point par Dan Harmon, qui se trouve être aussi plus facile à exploiter pour tout type de récit. Voici le schéma résumé que je me suis fait en français.
L’écrivaine écossaise Rachael Stephen a également développé une version tragique du cercle, très utile pour approfondir le personnage de l’antagoniste. Si vous voulez davantage de précisions, n’hésitez pas à me le dire en commentaire.
Venus du cinéma…
Blake Snyder a développé un modèle de scénario dans Save the Cat!
Les 15 étapes sont placées sur une structure classique en trois actes (exposition, développement, résolution). Ce découpage plus détaillé permet de bien comprendre les mécanismes à l’intérieur de chaque acte ainsi que les transitions.
Blake Snyder s’adressait au départ aux scénaristes de cinéma, mais nombre d’écrivains se sont servis de son modèle comme référence, au point que Jessica Brody a récemment sorti un livre dérivé du sien, Save the Cat! Writes a Novel, expressément destiné aux auteurs de romans. L’ouvrage de Brody est passionnant, car en plus de décrire précisément chaque étape, elle décortique dix romans de genres très différents et nous en montre tous les rouages.
Pour ma part, j’ai trouvé ces explications lumineuses, mais ce serait trop long à résumer ici. Si cela vous intéresse, dites-le-moi en commentaire et j’y reviendrai dans un article ultérieur.
Plus ardu, mais passionnant, le livre de John Truby Anatomie du scénario. Truby est scénariste et consultant en écriture, mais son livre s’applique parfaitement à tout type de fiction. Sa vision est globale et organique. Je ne le conseille pas en première approche, mais si vous êtes déjà familiarisé avec les diverses techniques d’écriture scénaristique, ce livre vous fera passer à une étape supérieure.
Pour conclure
Vous trouverez en ligne de nombreux modèles et explications. Encore davantage si vous lisez l’anglais. J’avoue que du coup, j’ai peu cherché en français, mais il existe plein de références, et j’espère contribuer à les développer à mon modeste niveau !
Quoi qu’il en soit, il arrivera un moment où il vous faudra examiner la structure de votre récit. Si vous êtes du genre écrivain-architecte ou « planner », ce sera sans doute avant même d’écrire une ligne. Si vous êtes plutôt écrivain-jardinier ou « pantser », ce sera peut-être à la relecture — ou en cours de route si vous vous trouvez bloqué. Dans tous les cas, l’étude des structures types vous sera utile. Elle vous guidera, vous sortira des ornières, vous confirmera que vous êtes sur la bonne voie, vous donnera aussi une idée d’où vous en êtes sur le long chemin de l’écriture.
Si vous voulez des précisions, un coup de pouce, une relecture, n’hésitez pas à laisser un commentaire ci-dessous ou à me contacter par mail, je me ferai un plaisir de vous répondre.
Bonne écriture !
Références
- Jerry Cleaver, Immediate Fiction, 2002 (non traduit à ma connaissance)
- Stephen King, Écriture : Mémoires d’un métier (On Writing), 2000
- Jessica Brody, Save the Cat! Writes a Novel (based on the books by Blake Snyder), 2018 (non traduit à ma connaissance)
- Dan Harmon, Story structure 101 (en anglais)
- Rachael Stephen (YouTube channel & site) (en anglais)
- John Truby, Anatomie du scénario (The Anatomy of Story), 2007
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